La transmission des connaissances et des compétences constitue un enjeu majeur pour les entreprises modernes. Développer une culture organisationnelle favorisant cette transmission au-delà des descriptions de poste crée non seulement un environnement d’apprentissage continu mais renforce la résilience et l’adaptabilité de l’organisation face aux défis futurs.
Les fondements d’une culture de transmission
La notion de transmission dans l’entreprise dépasse largement le cadre formel des formations professionnelles. Elle s’inscrit dans une vision où chaque collaborateur devient potentiellement un vecteur de savoirs, d’expériences et de valeurs. Cette dynamique repose sur plusieurs piliers fondamentaux qu’il convient d’identifier et de renforcer.
Le premier élément structurant réside dans la confiance mutuelle entre les membres de l’organisation. Sans cette confiance, les collaborateurs demeurent réticents à partager leurs connaissances, craignant parfois que la transmission de leur expertise puisse diminuer leur valeur individuelle. Le management doit donc créer des espaces sécurisants où le partage est valorisé plutôt que perçu comme une menace. Cette confiance se construit progressivement à travers des interactions positives, la reconnaissance des contributions individuelles et une communication transparente sur les objectifs collectifs.
L’implication de la direction comme moteur du changement
L’émergence d’une culture de transmission nécessite un engagement fort et visible de la part des dirigeants. Cet engagement ne peut se limiter à des déclarations d’intention mais doit se manifester par des actions concrètes et cohérentes.
Les dirigeants doivent incarner personnellement les comportements de transmission qu’ils souhaitent voir se développer dans l’entreprise. Lorsqu’un cadre dirigeant consacre du temps à partager son expertise, à mentorer des collaborateurs plus juniors ou à participer activement à des communautés de pratique internes, il envoie un signal puissant sur l’importance accordée à la transmission. Cette exemplarité constitue un levier de transformation culturelle bien plus efficace que n’importe quelle directive ou procédure formelle.
Parallèlement, la direction doit mettre en place les conditions structurelles favorables à cette culture de transmission. Cela passe par l’allocation de ressources dédiées (temps, espaces, outils), l’intégration de critères liés à la transmission dans les évaluations de performance, ou encore la création de rôles spécifiques comme des knowledge managers ou des facilitateurs d’apprentissage. La cohérence entre le discours et ces dispositions concrètes déterminera la crédibilité de la démarche aux yeux des collaborateurs.
Les mécanismes formels et informels de transmission
Une culture de transmission efficace s’appuie sur un équilibre subtil entre des dispositifs formels structurés et des dynamiques informelles plus spontanées. Cette complémentarité permet de répondre à la diversité des besoins d’apprentissage et des styles de transmission.
Les mécanismes formels incluent les programmes de mentorat, les communautés de pratique, les formations internes animées par des experts métiers, ou les systèmes de documentation des connaissances. Ces dispositifs offrent un cadre et une légitimité institutionnelle à la transmission. Ils peuvent être particulièrement pertinents pour les savoirs critiques ou complexes nécessitant une approche structurée. La mise en place d’un système de mentorat croisé, où chacun est à la fois mentor dans son domaine d’expertise et apprenant dans d’autres domaines, constitue une approche particulièrement fructueuse pour démultiplier les échanges de connaissances tout en valorisant les compétences de chacun.
La reconnaissance comme catalyseur d’engagement
La valorisation des comportements de transmission représente un facteur déterminant pour leur ancrage durable dans la culture d’entreprise. Sans reconnaissance appropriée, les efforts de partage risquent de s’essouffler rapidement.
Cette reconnaissance doit s’exprimer à travers différents canaux complémentaires. La reconnaissance symbolique, comme la mise en avant des contributeurs lors de réunions d’équipe ou dans la communication interne, nourrit le sentiment d’utilité et de fierté associé au partage. Les systèmes de badges ou de certification interne peuvent matérialiser l’expertise et la contribution des transmetteurs de savoirs. Plus fondamentalement, l’intégration de critères liés à la transmission dans les évaluations annuelles et les décisions d’évolution professionnelle envoie un message clair sur l’importance stratégique accordée à ces comportements.
La gestion des résistances au changement
La transformation vers une culture de transmission se heurte inévitablement à des résistances qu’il convient d’anticiper et d’accompagner avec intelligence. Ces résistances peuvent provenir de différentes sources qu’il faut identifier précisément.
Certains collaborateurs peuvent percevoir la demande de transmission comme une charge supplémentaire dans un quotidien déjà bien rempli. D’autres peuvent craindre de perdre un avantage compétitif personnel en partageant leurs connaissances spécifiques. Face à ces réticences, l’approche managériale doit combiner pédagogie et pragmatisme. Il s’agit d’abord d’expliciter les bénéfices collectifs et individuels de la transmission, comme le développement de compétences pédagogiques valorisables ou l’accès à d’autres savoirs en retour. Parallèlement, des aménagements concrets comme du temps dédié ou des outils facilitants peuvent lever les obstacles pratiques. L’identification et la valorisation des ambassadeurs naturels de cette culture de transmission, présents dans toutes les équipes, permettront de créer un effet d’entraînement progressif.
L’adaptation aux nouvelles générations et aux modes de travail hybrides
Les attentes des nouvelles générations et l’évolution vers des modes de travail plus flexibles et distanciels modifient profondément les modalités de transmission au sein des organisations. Cette évolution constitue à la fois un défi et une opportunité.
Les générations Y et Z manifestent souvent une préférence pour des formats d’apprentissage plus collaboratifs, interactifs et digitaux. Elles valorisent l’authenticité des échanges et la possibilité de contribuer activement plutôt que de recevoir passivement des connaissances. Les entreprises doivent donc faire évoluer leurs modalités de transmission pour intégrer davantage de formats participatifs, de contenus multimédias ou d’approches ludiques comme la gamification.
Le développement du travail à distance impose quant à lui de repenser les espaces et moments de transmission. Les interactions informelles de couloir, traditionnellement riches en partage de connaissances tacites, doivent trouver de nouveaux équivalents virtuels. La création de rituels d’équipe dédiés au partage, l’utilisation judicieuse d’outils collaboratifs ou la mise en place de sessions virtuelles thématiques peuvent maintenir cette dynamique de transmission malgré la distance physique.